SOIREE N°2 : DANS LE NOIR.

Les lumières du plafonnier clignotent tout à coup, jusqu'à ce que le lustre s'éteigne totalement et plonge ainsi le hall d'entrée dans une obscurité totale. Les autres pièces du château, elles aussi, sont maintenant plongées dans le noir ... Les achluophobes pourront, si nécessaire, demander à être évacués.

On était mardi soir, il était donc temps de me rendre à une nouvelle soirée. Le thème de celle-ci : dans le noir. OUAH, tout un programme. J'optais donc pour l'un de mes ensemble de cuir noir, afin d'être dans le thème. Je me préparais, m'habillais et une le tous bien installé. Je descendais habillé jusqu'au hall d'entrée où la lumière était encore légèrement présente. Sur place, j'allais vers une personne que je connaissais, Davia, et m'adressais à elle ainsi qu'au petit groupe l'accompagnant :

Bonsoir à tous. Je peux me joindre à vous ?

Loin de là, l'envie de m'imposer. Je cherchais juste à ne pas me retrouver tous seul, cela aurait été dommage pour la suite... Suite durant laquelle, notre sens de la cohésion, allait, j'en suis sûr, être mis à l'épreuve. Comme en écho à mes pensées, la pièce tomba dans la pénombre, la soirée pouvait donc commencer.

Avant que les lumières ne s'éteignent, ce mec là, Ariel, la sirène lessivée, s'était approché de Freya en me gratifiant de demeuré et en se faisant passer pour Félix. Putain, c'est vrai que c'est plus facile de ressembler à quelqu'un qui a l'air cool et qui est canon plutôt que d'être lui, ce pauvre type. J'avais envie de lui coller un beigne, parce que, sérieusement, il le méritait, mais je savais garder mon sang froid et me contrôler.

- C'est moi que tu traites de demeuré ? Mais mon pauvre, regarde-toi dans un miroir, t'en verras un vrai de demeuré , dis-je d'un ton dédaigneux.

Je ne voulais pas rester près de lui. J'aurais bien aimé le connaître un peu mieux si seulement on ne le dépeignait pas comme un  gros con, qu'il était visiblement. Enfin, je ne suis pas un imbécile, moi, et je change d'avis, donc en fait, peut-être que j'irais bien lui parler en tête à tête pour essayer de le comprendre, mais il me donnait pas vraiment envie. Enfin bref. Je m'en allais un peu plus loin quand les lumières se mirent à clignoter. Elle s’éteignirent quelques secondes plus tard pour mon plus grand plaisir (oui, en  fait ce soir je suis en mode pervers).

- Cool ! Et je me cognais déjà contre quelqu'un. Ah, c'est qui ? Dis-je sur un ton un peu trop enjoué.

Peut-être avait-il un poil sur-réagit en tirant tel un forcené sur sa bouteille pour la récupérer. Quoiqu'il arbora un fin sourire afin de montrer à Kira l'étendue de son humour... un peu bancale. Cette femme s'entêtait à lui piquer son alcool. Il se l'était procuré, tel un grand et elle en profitait. « Change d'ami, dans ce cas, veux-tu. » lui répondit-il d'un ton badin avant de littéralement cacher sa bouteille derrière son dos. Il s'entêtait à l'appeler sa bouteille, d'ailleurs, lorsqu'il était clair qu'il se l'était simplement approprié. Quoiqu'il en fut, Feliks était prêt à partager si jamais Kira faisait un petit effort. Lui donner quelque chose en échange qui vaille l'importance de la vodka à ses yeux autant dire... rien ? « Radine. » constata-t-il faussement outré. Finalement et parce que les lampes commençaient à dangereusement grésiller, il sortit la bouteille de sa cachette et la luit tendit, non sans un lourd soupir. « Ma bonté me perdra. » lui dit-il tandis que les lumières s'éteignaient pour de bon. Il entendit quelques cris de surprises, des chuchotement, beaucoup de brouhaha aussi et attrapa la main d'une candidate qui vint se coller à lui sans qu'il ne s'y attende. Bordel, ne pouvaient-ils pas tour rester dans leur coin ? « Je suis si reconnaissable que ça, même dans le noir ? » demanda-t-il à Davia sans la lâcher afin qu'elle ne s'éloigne pas. « Oh et j'aimerais beaucoup récupérer ma bouteille, j'ai soif. » en espérant que Kira ne se soit pas fait la malle avec.

Il n’y avait pas grand monde pour une soirée, chose étonnante vu comme la soirée d’anniversaire avait eu du succès. Sur une vingtaine de candidats, pas même la moitié était présente. Ils avaient si peur du noir ? Pour le coup, elle était presque déçue, se réjouissant presque d’emmerder ses camarades dans le noir. Tant pis, ça serait pour une prochaine fois.  Il n’y avait peut-être pas beaucoup de monde, mais il y avait Andie, et c’était déjà suffisant pour Reilly afin de passer une bonne soirée. Au moins, elle n’allait pas se retrouver avec un groupe de candidats qu’elle ne connaissait pas, ou pire, qu’elle n’appréciait pas. Andie fit un commentaire sur la tenue de la demoiselle, avant de la questionner sur son potentiel secret. « Oui. » Pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt ? Le secret de Reilly est percé à jour. « Maintenant que tu le sais, je vais être dans l’obligation de te faire taire. Tu as une préférence pour où sera ta tombe ? Le jardin chinois ou la grotte souterraine ? » Qu’elle questionne. Bien évidemment, la demoiselle rigolait, elle n’avait pas l’âme d’une tueuse. Leur groupe s’agrandit d’une personne, et après l’avoir questionnée sur son prénom, celle-ci se présenta comme étant Davia. Bien, Reilly tâcherait de s’en souvenir. Quant à la conversation à propos des bouteilles, elle ne l’a suivi que d’une oreille, pensant que chacun était libre de faire ce qu’il voulait, et surtout elle n’avait pas prêté attention à ceux qui se servaient allègrement de l’alcool. Ce fut ensuite au tour de Silver de venir vers le petit groupe. « Plus on est de fous, plus on rit. » Ils n’allaient tout de même pas l’envoyer balader, d’autant plus que Reilly appréciait le jeune homme. Quelques instants après l’arrivée de Silver, les lumières se mirent à clignoter, avant que la pièce ne sombre totalement dans l’obscurité. Enfin. « Que la soirée commence. » lança-t-elle, tentant de prendre une voix de psychopathe, bien que tout ce qui touchait à l’humour n’était pas sa spécialité.

Cela pouvait être drôle. C'était le premier truc qui m'était passé par la tête lorsque j'avais entendu à quoi rimait cette soirée à laquelle nous étions ce soir encore conviés. De toute évidence la production s'était sentie tellement fière de sa pièce obscure qu'elle avait décidé de recréer l'ambiance en plus grand, au cas où certains d'entre nous n'aurions pas eu l'honneur - ou la malchance ? - de s'y aventurer. J'avais pour ma part déjà donné, entrant par la même en collision avec une candidate dont j'avais du attendre de retrouver la lumière pour apprendre l'identité. Cléo n'était d'ailleurs pas encore là ce soir, à ce que j'avais pu en voir en arrivant dans le hall. Enfin en voir, ça c'était jusqu'à ce que ce cher William décide qu'il était temps d'en venir à l'extinction des feux, et bientôt il fit ici noir comme dans un four. Pas que j'ai déjà mis les pieds dans un four, mais enfin. « Aoutch ! » Je n'avais même pas encore pu habituer mes yeux à l'obscurité que déjà voilà qu'on me me marchait sur les pieds, c'était donc une habitude dans ce château. Ne reconnaissant pas la voix au premier abord, je m'étais contenté de répondre « Mon pied te remercie, mais je serais bien plus satisfait si tu avais un verre à partager. Un verre plein, j'entends. » Parce qu'avec tout ça je n'avais même pas pris le temps d'en attraper un avant de finir dans le noir ... et aller m'en chercher un maintenant me semblait une mission périlleuse.

Penser à voix haute avait provoqué quelques réactions autour de lui. Nottamment la blonde dénommée Davia qui défendit le type à la bouteille tel un chiot tentant de protéger son os. Soit, Charly s’en foutait complètement. Il était bien trop occupé à observer la pièce et les interactions entre chacuns. Silver débarqua, Charly l’accueilla d’un sourire. Ce dernier ne disparaissa pas même lorsqu’il se vu qualifier indirectement de goujat. Il aurait pu faire un effort c’est vrai, il s’en rendit bien compte. La lumière s’éteignit. « Que la soirée commence. » Il n’en pensa pas moins. Tout à coup l’identité de ses voisins lui devenait incertaine. Le brouhaha qui s’installait réveillait ses sens. Planant sur l’agréable sensation que lui provoquait cette mise dans le noir, il glissa l’une de ses mains dans sa poche. Rien de tel qu’une bonne clope pour partir sur les chapeaux de roue. Même dans le noir sa mécanique était bien huilée et il n’eut aucun mal à glisser un rouleau de tabac entre ses lèvres. La flamme dansante du briquet illuminait un faible périmètre. N’en resta plus qu’un point rouge brûlant, embout de cigarette se consumant. Charly tirait sans gène, il était là sur sa chaise assis tranquillement à ne plus savoir si ses voisines étaient toujours présentes ou non toujours était-il qu’on le distinguait de temps à autre lorsqu'il prenait l'initiative d'empoisonner un peu plus ses poumons.