you can't play on broken strings (25.07, 09h25)

+ holly

Samedi était enfin arrivé. C'était le dernier jour et il ne croyait pas être devenu fou, à moins qu'il le soit mais ne s'en soit tout simplement pas rendu compte, ce qui était tout à fait possible. Quoi qu'il en soit, leur calvaire devrait prendre fin ce soir, le maître leur ferait connaître sa décision à propos de la saison, à savoir si celle-ci se poursuivrait ou s'il y mettait un terme. Leroy espérait vraiment que ça ne se termine pas ce soir, et surtout pas sur une note si négative, car la semaine qu'il venait de passer avec les autres avait été lion d'être agréable et il pensait que ceux qui avaient eu à endurer cela méritait bien de passer quelques derniers jours dans le confort du château, comme une sorte de dédommagement pour l'enfer dans lequel le maître les avait fait vivre. Ah si certains ne croyaient pas en son sadisme, ils devaient tous en être convaincus à présent. L'australien l'était lui en tout cas, c'était vraiment cruel de ne leur laisser que deux lavabos pour qu'une vingtaine d'individus puisse se laver. William avait peut-être des raisons d'être en colère mais c'était un peu extrême là tout de même. Enfin il avait réussi à conserver une hygiène respectable pendant ces quelques jours et c'était le dernier, ce qui avait de quoi le soulager. Il terminait de se raser alors qu'Holly venait de passer la porte. « Je te laisse la place, si tu veux. » Elle s'en fout peut-être, après une semaine comme celle qu'ils avaient passée le concept d'intimité semblait un peu surfait.

D’habitude vivre dans des endroits un peu sommaires comme ceux-là ne me dérange pas à vrai dire, je suis un peu habituée à squatter dans des petits périmètres comme celui-là vu que mon appart ne dépasse pas dans sa totalité la taille de cette salle d’attente, mais chez moi y’a quand même une douche, y’a aussi mon putain de bon lit thérapeutique avec maintien lombaire qui me manque à un niveau pas possible et y’a aussi tout le confort décent de vie contrairement à ici faut pas déconner non plus, donc non franchement si après tout ça on vient me dire que l’aventure touche à sa fin à cause d’une bande de fragiles désaxés qui se sont pas assez bougé le cul, je vous jure je vais rager. Mais je garde espoir, j’ai quelques notions d’optimisme pour continuer à croire à un avenir plus radieux et je me lève de ce sac de couchage horrible pour aller me laver le visage et compléter ainsi mon processus du réveil matinal. Je déambule et je parcours les mètres qui me sépare des toilettes dans une tenue légère en mode je m’en bats les couilles de l’intimité je suis chez moi, et je me dis que la simple culotte et le long t-shirt qui descend jusqu'aux fesses font l'affaire, ouais. C’est comme au McDo ici, on vient comme on est, on se fait pas chier à réfléchir à quoi mettre et quand bien même je vis avec une vingtaine de tarés, je suis toujours aussi spontanée parce-que c’est un peu comme ça comment je fonctionne. Je crois que tout le monde a fini par s’y habitué. A part Jan je crois, mais ça c’est son problème, pas le miens. Si c’est un trou du cul constamment constipé qu'il aille se soigner il va pas entraver mes libertés à moi. Quand j’arrive je remarque mon champion entrain de se raser, et on se salue même pas tellement sa tronche je l’ai vu un milliard de fois cette semaine que je m’y suis trop familiarisée maintenant. J’ai même l’impression qu'en voyant Leroy ce matin, on aurait dit ce frère qui squatte avec toi depuis pas mal de plombes maintenant dans un appart HLM « naan c’est tranquille » bon un frère gentil qui te casse pas les couilles en réquisitionnant les toilettes deux heures à se mater ou à se préparer, ou qui commence à gueuler de bon matin juste pour qu’on le laisse raser sa foutue barbe comme il le sent, créant cet embouteillage et cette file d’attente monstre dès le petit matin juste parce-que monsieur veut être présentable alors que y’a qu’une seule salle de bain pour vingt-six personnes. « tu penses qu’on reverra le château ce soir ? » je sais pas ce qu’il en pense, je m’en fous à vrai dire vu que c’est la prod’ qui décide, mais voilà c’est la discussion bidon du matin, on passe tous par cette case on y peut rien « et ta fille, est-ce qu’elle te manque pas un peu ? » parce-que ouais je suis un peu surprise de voir Shannon, lui et pas mal d’autres gens qui ont des proches à voir l’extérieur être resté dans des conditions pareilles. Franchement chapeau, parce-que moi j’ai personne qui m’attend à l’extérieur ; ma vraie famille c’est ici. C’est pour ça aussi que j’ai pas envie que tout ça se termine, si brusquement …

Il avait fini, il pouvait lui laisser la pièce pour elle toute seule, enfin jusqu'à ce que quelqu'un d'autre ne vienne squatter, là il ne pourrait rien faire, mais ça ne semblait pas la déranger alors il était resté. Il ne s'était même pas étonné de la voir en petite tenue, c'était devenu tellement banal tout ça après une semaine passée ensemble à tourner en rond dans le même bocal que l’extrême aisance dans laquelle certains vivaient ne le dérangeait même plus. Quoi qu'il en soit, il était normal en cette dernière journée avant une possible réintégration du château, que les candidats commencent à se poser la question. « J'espère, je l'aurais vraiment mauvaise d'être resté enfermé ici sans qu'il y ait de suite à l'aventure. » Et ce devait être ce que ressentait la plupart des autres, en tout cas il le croyait. Il trouvait que ce serait une bien pire punition de les priver du retour qu'ils ont attendu. Il ne l'avait pas beaucoup montré, il s'était surtout senti frustré et blasé toute la semaine, mais il pensait revoir la demeure du maître et le village dans la soirée, oui. Si ce n'était pas le cas il serait vraiment dégoûté, surtout qu'il aurait pu rentrer chez lui, retrouver son pays et surtout son Ashley. Holly lui demandait si elle ne lui manquait pas, un peu. « Si, énormément même, et encore plus depuis qu'on est là. J'ai bien failli prendre la porte pour aller la retrouver Samedi dernier. » Sur le coup, ouais, déjà il aimait bien claquer les portes donc ça lui aurait fait du bien, il se serait défoulé, puis il se disait qu'il ne rentrerait que plus tôt, il serait bien éliminé un jour. Et finalement il était resté, parce qu'il ne s'était pas fait chier à s'inscrire et à passer les castings pour rien, parce qu'il était là depuis trois semaine déjà et que ça se passait plutôt bien, et parce qu'il ne pouvait pas savoir ce qu'il allait se passer, comme il n'avait pas vu arriver ce revirement de situation. C'est pour ça qu'il avait beaucoup fait la gueule cette semaine, il n'avait rien à faire que de penser et il n'arrêtait pas de penser à des choses qui l'énervait ou le faisait se sentir coupable comme le fait de rester ici et de priver sa fille de son père alors qu'elle serait privée à vie de mère. Ce n'était pas juste, non, mais Leroy n'était pas là pour rien, c'était son meilleur argument, le seul peut-être. Il avait poussé un soupire. « Je dois être une espèce de père indigne. » Quelque part ils l'étaient un peu tous, son père n'avait à lui pas été un excellente exemple, celui d'Elise était aussi assez particulier, les autres qu'il connaissait avaient tous des défauts même si, les considérant comme des potes il s'en fichait. « T'as quelqu'un qui t'attends dehors ? » Il n'en savait vraiment rien, il posait la question comme ça, pour parler d'elle plus que de lui, à vrai dire il préférait.

Il risque d’être déçu, et c’est compréhensible. A vrai dire je le serais aussi. Voir même plus. Après tous les putains d’efforts que je viens de faire cette semaine, ils ont pas intérêt à tout arrêter. Surtout pas. Je le vivrais très mal. Dans ma tête, ça sera l’apocalypse selon Saint-William. Ça aura un gros impact sur mon moral les douze prochains mois. Dans le genre Krach de 1929, voir le 11 septembre tellement je veux pas que ça s’arrête. Donc si on m’annonce ce soir que l’aventure décroche à cause d’une brochette de gueux incapables de se bouger le cul, je risque d’en assassiner quelques uns. Leroy n’en fait définitivement pas partie, car bon il a envie que tout ça perdure aussi, et puis il a une fille. Je vais pas me mettre à assassiner un type qui a une fille qui l’attends dehors, je suis pas si tarée que ça. D’ailleurs elle doit certainement lui manquer. Si j’étais à sa place, je sais pas si j’aurais tenu à ce point. Il a failli se casser, mais ça va il est encore là. Il mérite des applaudissements de ma part. « dis toi qu’elle sera fière de son papa » m’ouais, il a tenu jusqu’au bout, j’espère que ça aura le mérite de payer mais dans tous les cas, elle peut se vanter auprès de ses copines d’avoir un daddy comme lui. « naan dis pas ça ! Au contraire elle a de la chance de t’avoir » ouais, de ce que j’ai vu de Leroy durant toutes ses semaines passées à ses côtés, je peux dire que c’est un bon gars, qui doit faire un bon père aussi « du moins, c’est ce que je pense vraiment » m’ouais, j'essaye de lui remonter le moral, à ma façon on va dire « tu vois par exemple, si je voulais me caser un jour où avoir un père pour ma fille et mes enfants, j’aimerais qu’il te ressemble un peu » Leroy est doux, il est gentil, attentionné, mature, serviable et « t’as une tête de père de famille, en fait » c’est plus ça ouais. Et je crois que c’était un compliment, du moins je l’espérais. Bon je m’approche du lavabo et je m’éclabousse le visage pour le tamponner par la suite avec ma serviette. « j’imagine qu’elle doit être encore petite … elle a quel âge déjà ? » j’aimerais bien la rencontrer un de ces jours. Je m’imagine déjà une petite fille mignonne dans le genre princesse gâtée par la vie qui ressemble un peu à son père, je sais pas pourquoi d’ailleurs. Il me retourne la question, et là gros blanc de cinq secondes. « euh … non. » à vrai dire j’étais pas si paumée que ça en fait « fin’ si … y’a mes copines, surtout deux qui squattent avec moi dans mon appart’ et qui me suivent tous les jours, mais sinon à part ça … pas grand-chose » j’ai pas de famille, pas de fiancé comme James, pas d’enfant comme lui donc … bref, rien à signaler, hm.