the lion's roar, 22/07 - 14h56

w/judas

En temps normal, Jan n’est pas du genre solitaire par volonté. C’est plutôt sa situation qui le prive de voir du monde et qui l’oblige à rester dans son coin. Lui, il n’est jamais contre le fait de voir des nouvelles têtes, il a le contact facile et l’espoir secret de se faire des amis. Et s’il a profité pendant trois semaines de passer un maximum de temps avec ses camarades pour profiter de cette sensation d’être entouré, il doit bien admettre qu’en ce milieu de semaine, il n’aspire qu’à une chose : la solitude, aussi surprenant que cela puisse paraitre. Il n’en veut à personne, il adore toujours autant ses colocataires, mais après quelques jours à être collés les uns aux autres, même lui commence à en avoir marre. Il n’y a aucune intimité, aucun moyen d’être seul avec quelqu’un, il y a toujours un brouhaha constant, même quand il dort il a l’impression d’être pris au piège. Et pourtant, il est du genre souple, à en supporter bien plus que certains ici, mais il a grand besoin de retrouver un espace un peu moins confiné qui ne lui donnera pas l’impression d’être un rat de laboratoire. Et si le problème était seulement l’espace, ce serait encore supportable, mais la décoration n’arrange rien. Des murs blancs, ou plutôt gris sales, des meubles sortis du siècle dernier, inconfortables, un sol poussiéreux qui semble ne pas avoir été nettoyé depuis des semaines… Rien susceptible de les mettre à l’aise, même si ce n’est pas le but. Mais tout de même, un peu de peinture, un vase avec des fleurs, un tableau, ce n’est quand même pas trop demandé pour égayer un peu la salle d’attente ? Adossé contre un mur à observer la salle d’attente et le mur devant lui, Jan imagine des couleurs, des tableaux, des photos, quand il est interrompu dans ses pensées par la silhouette approchant à sa droite, qu’il ne tarde pas à reconnaître. « Ah salut Judas ! » Il lance au candidat, avec un léger sourire, comme à son habitude, avant de reporter son attention sur le mur blanc en face de lui. « Tu sais quoi ? Ta toile aurait eu sa place sur ce mur. » Continue-t-il, faisant référence à la toile donnée par Judas lorsqu’ils s’étaient croisés dans la salle d’expression artistique. Ah, qu’est-ce qu’elle lui manque cette salle. « Parce que tu trouves pas que ça manque cruellement de déco par ici ? C’est d’une tristesse des murs blancs, c’est le meilleur moyen pour qu’on devienne fou. » Ajoute-t-il, un peu pensif, sans se soucier de savoir si sa réflexion intéresse Judas ou non. Probablement que non. « Tu deviens pas fou, toi, d’ailleurs, non ? » Il juge utile de demander par la suite, car même si Judas lui a fait une bonne impression lors de leur première rencontre, le candidat apparait comme brut de décoffrage, alors s’il vire cinglé, Jan aimerait autant le savoir, vu qu’une majorité de candidats semblent déjà au bout de leur vie.

Je m’emmerdais. Je tournais en rond dans cette salle d’attente. Je me faisais chier. On était là depuis quoi ? trois jours ? J’avais l’impression qu’on était là depuis trois semaines soit autant de notre temps dans le château. Le temps ici ralentissait incroyablement, même une seconde c’était long. L'espace était petit, le nombre de candidats élevés, le temps était incroyablement long, tout pour péter un câble. Mais fallait pas craquer, le pire je crois que c'était surtout la remise en question de la saison. Et comment ça se passe d'ailleurs ? Va y avoir nominations ou pas cette semaine ? Bref. Je marchais donc sans vraiment de but particulier dans cette salle d’attente assez glauque en fait. Marchant, je fus interrompu par Jan. Pas étonnant, là tu croises tout le monde partout, tu peux pas être tranquille plus de cinq minutes dans cette pièce. « Salut Jan. » Ceci dit Jan, c’est un mec que j’aime bien, je sais pas pourquoi, c’est pas le genre de mecs avec qui j’aimerai trainer tous les jours, mais il me fait rire malgré tout. D’ailleurs sa remarque suivant me fit sourire. Il faisait allusion à la dernière fois, je lui avais donné une toile, objectivement c’était pas terrible comme toile, mais il m’avait quand même complimenté et là voilà qu’il en rajoute une couche en me disant qu’elle aurait sa place sur le mur. « A défaut d’avoir la joconde, j’imagine que c’est toujours ça. » Ouais un peu de déco ça fait pas de mal, même si c’est pas vraiment ce qu’on peut appeler du grand art. Il me dit lui aussi que ça manquait de déco, et que ça rendait le tout assez triste à en devenir fou. «  Au pire si tu veux on a qu’à foutre un peu de couleurs dessus, genre je sais pas moi quelqu’un doit bien y avoir quelques feutres. » Ca me rappellera mon enfance que de tagguer les murs. Bon pas une activité très amusante, mais vu comment on s’ennuie dans cette salle des indices, même s’amuser à compter jusqu’à un million ce serait une bête d’activité. Il me demanda si je commencais pas si je commencais pas à devenir fou. J’haussais les épaules. « Cette ambiance est assez bizarre, mais je m’en fous.. » J’ai l’habitude, de vivre dans un petit espace de merde sans décoration. J’ai eu l’habitude de vivre entassé aussi même si ça, pour le coup ça me fait plus chier qu’autre chose.

Jan n’est pas contre le fait de réfléchir à son aventure comme le souhaitait le maître, mais il est pas sûr que les mettre dans une telle pièce soit une idée de génie. Car ça ressemble plus à un cachot de torture qu’à un lieu où il fait – plus ou moins – bon vivre. Il y a qu’à voir les murs, c’est complètement déprimant, on pourrait presque y voir la moisissure les recouvrir, c’est pas très sain tout ça. S’ils étaient un peu plus colorés, nul doute que certains candidats n’auraient pas viré dépressifs, vu qu’entre les larmes ou les plaintes, on ne peut pas dire que l’ambiance soit merveilleuse. Alors oui, la toile de Judas aurait largement eu sa place sur ces murs, c’est dommage que Jan ne l’ait pas emportée avec lui en quittant le château, il espère d’ailleurs qu’il pourra la récupérer si William annonce la fin de la saison, samedi. « Ah la Joconde d’ailleurs, tu l’as déjà vue ? » Question qui peut sembler sortie de nulle part, mais puisque Jan a tendance à vivre à travers les autres, si Judas a déjà voyagé jusqu’en France et qu’il a vu le fameux tableau, Jan aura sûrement des questions à lui poser, malheureusement pour son camarade. Et voilà que celui-ci lui propose une alternative pour décorer les murs, alternative qui ne séduit pas le rouquin, au contraire. « Je sais que Kendra a des crayons et l’idée est bonne je trouve, mais euh… je suis pas sûr que dégrader les murs soit une bonne idée, surtout cette semaine où William est déjà pas très content… » Non, dégrader les lieux serait le meilleur moyen pour s’assurer une sortie précipitée, avant même de connaître leur sort lors de la soirée de samedi. Et pour Jan qui était déjà bien impressionné par le maître des lieux, et dont le coup de gueule de samedi n’a rien arrangé, le fâcher est vraiment la dernière chose qu’il souhaite. Bon, Jan se tient droit depuis le début de la semaine par rapport à d’autres qui n’hésitent pas à fumer dans les toilettes ou à cacher de l’alcool, mais c’est pas une raison pour contester l’autorité du maître des lieux. En parlant de lieux, Jan se demande légitimement si Judas ne succombe pas à la folie, vu que d’autres ont déjà céder. Mais non, qu’il se rassure, Judas s’en fout, tout simplement. « Ah oui ? J’ai le droit de te demander comment t’arrives à t’en ficher ou c’est trop indiscret ? Faut me le dire si c’est le cas, hein. » Surtout que Judas a l’air plutôt secret comme type, Jan veut pas l’énerver en posant une question qui peut paraître déplacée. Mais bon, c’est vrai qu’après trois semaines il sait toujours pas grand-chose du garagiste, pourtant c’est pas faute de l’apprécier, alors ce serait quand même le moment qu’il apprenne ne serait-ce qu’un détail de la vie de l’homme.